L'Afrique garde le cap de la croissance, mais gare à la démographie

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Johannesburg (AFP)

L'Afrique résiste à la chute des cours des matières premières et garde le cap de la croissance, estime un rapport publié lundi par l'OCDE avec d'autres institutions (BAfD, PNUD) qui s'inquiète cependant des effets de l'actuel essor démographique. 

Le rapport, qui reprend peu ou prou les dernières prévisions de croissance du Fonds monétaire international (FMI) de 4,5% en moyenne cette année et 5% en 2016, s'attarde sur le défi structurel qui attend le continent africain: le cap des deux milliards d'habitants devrait être atteint en 2050 (contre un milliard aujourd'hui) soit un quart de l'humanité contre 15% actuellement.Les villes mais aussi les campagnes vont se développer rapidement.

Dès cette année, ce sont environ 19 millions de jeunes qui vont entrer sur le marché du travail en Afrique subsaharienne, et 4 millions en Afrique du Nord.

Et la tendance va se poursuivre sur 15 an à raison de près 30 millions de jeunes actifs supplémentaires chaque année sur l'ensemble du continent, soit l'équivalent de trois fois la population de la Belgique.

"La croissance démographique va ressembler à celle des Indiens et des Chinois en valeur absolue mais pour l'Afrique, cela correspond à un doublement.Si l'on sait l'utiliser cela peut procurer d'énormes avantages puisqu'on estime en Chine et en Inde à 40% la part de la croissance due à la démographie", explique Mario Pezzini, directeur au centre de développement de l'OCDE.

"Par contre, il faut aussi l'absorber.Une des solutions serait de créer des emplois publics, mais l'assiette fiscale est trop réduite.En Egypte on a calculé qu'il faudrait 180.000 emplois publics par an, c'est impossible", dit-il.

Des pistes existent: mieux explorer les ressources naturelles, se spécialiser dans la production de composants intermédiaires pour l'industrie.

Si le rapport se montre donc encourageant, partant de l'hypothèse que l'épidémie d'Ebola sera "maîtrisée courant 2015" et que le continent est "prêt à reprendre sa tendance de croissance à moyen terme", il pose la question de l'après 2016.

"Une leçon de l'épisode continu de croissance de l'Afrique (depuis l'an 2000, ndlr) est que la stabilité politique et sociale sont des conditions préalables essentielles.Mais cette stabilité dépend aussi du partage des fruits de la croissance.Rares sont les pays africains exemplaires à cet égard", souligne le rapport.

- 'Emplois productifs' -

La pauvreté reste généralisée dans une majorité de pays, les inégalités élevées et "la gestion du secteur public ne s'est pas beaucoup améliorée pour le continent", selon le rapport. 

L'Ethiopie, classée parmi les cinq économies les plus dynamiques au monde par le FMI avec 10,3% de croissance en 2014, fait figure d'exception. 

"De tous les pays affichant une croissance annuelle moyenne supérieure à 6% entre 2001 et 2014, l'Ethiopie est la plus performante pour ce qui est de la croissance inclusive", souligne le rapport.

"Fondamentalement, l'intégration économique régionale demeure la clé de la libération du potentiel de croissance de l'Afrique, de son développement, du renforcement des échanges et de sa participation accrue à l'économie mondiale", ajoutent les auteurs.

La demande intérieure a largement sous-tendu la croissance en 2014, mais que se passera-t-il si le repli des cours du pétrole et des matières premières continue et si la conjoncture internationale hésite ?

Trente pays africains dépendent exclusivement de cinq produits ou moins à l'export, et huit pays ne dépendent que d'un seul produit pour assurer 75% de leurs exportations: le pétrole - sauf au Botswana qui vit du diamant.

"Il devient de plus en plus urgent de créer davantage d'emplois productifs", souligne le rapport, non seulement dans les villes mais à l'écart des centres urbains où la majorité de la population africaine va continuer d'habiter dans l'immédiat. 

Or, les politiques actuelles ne se sont pas révélées très fructueuses jusqu'à présent et l'industrialisation ne suit pas, souligne le rapport: "Le manque d'opportunités dans les villes a même conduit certains migrants à retourner dans les zones rurales".

"Certains experts minimisent le défi de l'expansion démographique, observant que l'Afrique a su y faire face jusqu'à présent.Il ne faut toutefois pas sous-estimer l'ampleur des changements à venir (...) la croissance démographique en cours est sans précédent tant par son ampleur que par son rythme", insiste le rapport.

Sur le continent, les pays où le taux de fécondité est inférieur à trois enfants par femme sont l'exception: l'île Maurice, l'Afrique du Sud et les pays d'Afrique du Nord, rappelle le document.

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