L'ex-président nigérian Obasanjo demande à Buhari de ne pas se représenter

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Abuja (AFP)

L'ex-président du Nigeria Olusegun Obasanjo a publié mardi une tribune lapidaire dans laquelle il demande à Muhammadu Buhari de ne pas se représenter en 2019, alors que des voix s'élèvent pour apporter un soutien à une future candidature du chef de l'Etat de 75 ans. 

Citant tour à tour "les pauvres performances" du président Buhari, depuis son arrivée au pouvoir en 2015, "pauvreté, insécurité, mauvaise gestion économique, népotisme...", Olusegun Obasanjo, qui a dirigé le Nigeria de 1999 à 2007 et garde un poids important sur la scène politique locale, appelle le président actuel à "considérer le repos". 

Le premier mandat du président Buhari, 75 ans, a été marqué par la pire récession économique de l'histoire moderne du Nigeria, qui a perdu sa place de première économie d'Afrique et par son absence du pays pendant près de six mois pour être soigné à Londres d'une maladie non dévoilée.

"J'ai voté pour lui", a rappelé l'ex-homme fort du Nigeria, qui avait apporté son soutien à Muhammadu Buhari lors du dernier scrutin de 2015.

"Je connaissais M. Buhari (...) et sa faible connaissance en économie, mais je pensais qu'il ferait appel à des Nigérians qui pourraient l'aider (...) car l'économie n'obéit pas aux ordres militaires", a-t-il taclé mardi, en référence à la réputation intransigeante de Buhari, un ancien général - comme lui-même.

M. Obasanjo a appelé à la création d'un "mouvement", la "Coalition pour le Nigeria", "qui n'a pas besoin d'être un parti politique", assure-t-il, mais qui doit rassembler des membres qui veulent un Nigeria "nouveau, vert et transparent".

Aussitôt après la parution de la tribune, deux ténors du parti au pouvoir All Progressive Congress (APC), Bola Tinubu et Bisi Akande, ont été convoqués en urgence à la villa présidentielle d'Abuja. 

 - 'Dommageable' -

Cette sortie met en lumière les fractures du parti, et du Nigeria en général, entre les leaders du Nord et ceux du Sud, au-delà de leur appartenance politique. 

La semaine dernière, sept gouverneurs - issus du Nord musulman, comme M. Buhari - ont rendu visite au président à Abuja."Ceux que vous voyez ici veulent que le président se présente en 2019 et continue à mener le pays dans la bonne direction", avait alors déclaré Nasir El-Rufai, gouverneur de l'Etat de Kaduna. 

Le président Buhari semble être lâché par son épouse elle-même, qui a aussitôt repris des tweets des plus grands opposants de son époux, notamment une vidéo du sénateur Ben Murray-Bruce, les partageant sans commentaire sur son profil. 

"Aisha Buhari est probablement la personnalité la plus aimée au Nigeria aujourd'hui, surtout par les critiques de l'administration de son mari", a ironisé mardi Reuben Abati, conseiller en communication de l'ex-président Goodluck Jonathan, dans un éditorial. 

La première dame avait déjà lancé un pavé dans la mare en 2016, affirmant dans une interview à la BBC qu'elle ne le soutiendrait pas s'il devait se représenter, et dénonçant l'existence d'une "cabale" à Abuja qui fait pression sur son époux.

Pour Cheta Nwanze, analyste politique pour SBM Intelligence, une société de conseils basée à Lagos, cette déclaration d'Obasanjo "sera très dommageable pour Buhari et pour ses ambitions d'être réélu pour un second mandat".

Une analyse que partage Chris Ngwodo, politologue nigérian : "Le président n'est plus invincible, et beaucoup de monde peut le remarquer à travers cette tribune".

"Ceux qui avaient toujours eu peur de parler ont trouvé une voix à laquelle se rallier, et il y aura un réalignement", prédit M. Nwanze, qui souligne toutefois que les ambitions de l'ex-président sont avant tout personnelles et qu'il avait fait des sorties identiques en 2015 à l'encontre de Goodluck Jonathan, qui avait finalement perdu face à M. Buhari.

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