La ruée des étrangers sur les terres du Mozambique suscite des désillusions

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MAPUTO (AFP)

Le Mozambique avait placé de grands espoirs dans un projet de biocarburants, qui devait créer des milliers d'emplois sur 30.000 hectares de terres en jachère.Le rêve effondré, le site est devenu le symbole des errements de la ruée étrangère sur les terres arables d'Afrique.

Il y a trois ans, le gouvernement avait signé un accord avec ProCana, une entreprise comprenant des intérêts britanniques et sud-africains, qui s'était engagée à investir plus de 500 millions de dollars dans la production de cannes à sucre et leur transformation en carburant.

Mais en décembre les autorités ont déclaré le contrat nul et non avenu, arguant que les propriétaires avaient failli à leurs obligations: en deux ans, ils avaient à peine débroussaillé 8.000 des 30.000 hectares et pas planté un seul pied de canne.

ProCana n'est pas un cas isolé.A la fin de 17 ans de guerre civile, en 1992, le pays a ouvert grand les bras aux investisseurs étrangers dans l'espoir qu'ils aident le secteur agricole - autrefois important producteur de noix de cajou et de sucre - à se relever.

En théorie, l'idée était bonne: en 2002, seuls 12% des 36 millions d'hectares de terres arables étaient cultivés, selon l'Organisation pour l'agriculture et l'alimentation FAO, et l'insécurité alimentaire régnait dans de nombreuses régions.

Mais le Mozambique, comme d'autres Etats africains, n'a pas réussi à trouver l'équilibre entre la nécessité d'attirer des savoir-faire et la protection des petits agriculteurs de subsistance, qui représentent environ 80% de ses 20 millions d'habitants.

De 2004 à 2008, le pays a vendu 2,7 milliards de terres à des compagnies privées, en grande majorité étrangères, dans le but d'augmenter de 50% sa surface agricole, selon un récent rapport de la Banque mondiale (BM).

Mais la plupart des projets portaient sur des biocarburants ou des cultures d'exportations comme le riz et, en 2009, un audit a montré qu'un tiers des terres cédées restaient inexploitées.La situation alimentaire ne s'est donc pas améliorée, ce qui a encore suscité des émeutes meurtrières début septembre.

Autre problème: les démarcations des terrains étant souvent approximatives, le gouvernement a souvent vendu des terres qui étaient déjà cultivées par les communautés locales, a souligné la BM.

Pour elle, le problème tient partiellement au fait que "les institutions chargées de ces contrats étaient souvent mal équipées et pas prêtes à gérer l'afflux de demandes".

Le Mozambique dispose pourtant d'une législation poussée, qui impose aux entreprises privées d'obtenir l'accord des communautés avant d'utiliser leurs terres.Mais, selon les associations, ces accords sont souvent trop vagues pour être efficaces.

Les entreprises promettent des emplois et les habitants sautent sur l'opportunité d'avoir un revenu stable, même si souvent ils sont déçus par la faiblesse des salaires ou la courte durée des contrats, dit-il.

"Les communautés ne comprennent pas qu'en cédant leurs forêts, par exemple, elles vont perdre ce qui les fait vivre parce qu'elles ne pourront plus y chasser, y cueillir des fruits, des plantes ou ramasser leurs matériaux de construction", estime Joao Nogeiro, un militant écologiste.

Le militant se rappelle d'une compagnie qui a un jour consulté une communauté au sujet de la terre de ses voisins.

"Comme l'entreprise était pressée, elle a préféré se mettre d'accord avec cette communauté plutôt qu'avec les vrais propriétaires des terres", assure-t-il.

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