Le Parlement soudanais a proclamé lundi comme "ennemi" le gouvernement du Soudan du Sud dont les troupes ont pris le contrôle de la zone frontalière de Heglig, principal champ pétrolier du Soudan.
Une résolution en ce sens adoptée à l'unanimité par les députés à Khartoum est intervenue au lendemain d'un bombardement aérien soudanais d'un camp de Casques bleus en territoire sud-soudanais faisant 10 morts et 14 blessés parmi les civils aux alentours du camp, selon les Sud-Soudanais.
"Le gouvernement du Soudan du Sud est un ennemi et tous les organismes d'Etat doivent le traiter selon ce principe", annonce le Parlement dans sa résolution, au moment où les craintes d'une nouvelle guerre civile s'amplifient du fait des combats entre les deux pays voisins.
Après le vote, le président du Parlement, Ahmed Ibrahim El-Tahir, a appelé l'assemblée à renverser le Mouvement populaire de libération du Soudan (SPLM), les ex-rebelles sudistes désormais au pouvoir au Soudan du Sud, indépendant depuis juillet 2011 à la suite d'une guerre civile dévastatrice (1983-2005).
"Nous combattrons le SPLM jusqu'à ce que nous mettions fin à son gouvernement au Soudan du Sud.Nous rassemblons toutes nos ressources pour atteindre ce but", a-t-il ajouté.
Les relations entre Khartoum et Juba sont tendues depuis la partition, les deux pays ne parvenant pas à régler par la diplomatie les questions restées en suspens: tracé de la frontière, partage des revenus pétroliers, statut de la province frontalière d'Abyei.
Après s'être mutuellement accusées de soutenir des rebelles, les deux armées se sont directement affrontées pour la première fois fin mars lors d'une première incursion sud-soudanaise dans la zone contestée de Heglig, au Kordofan-Sud, au Soudan.
La situation s'est encore envenimée quand l'armée sud-soudanaise a pris le contrôle le 10 avril de Heglig, qui renferme la moitié des réserves pétrolières du Soudan.
Dimanche soir, l'aviation de Khartoum a bombardé un camp de Casques bleus de l'ONU dans l'Etat d'Unité, au Soudan du Sud, sans y faire de victime.
Mais les bombes larguées ont tué sept civils et blessé 14 aux alentours, selon le ministre de l'Information de l'Etat, Gideon Gatpan.Trois autres personnes ont en outre été tuées dans des villages autour de Bentiu, capitale de cet Etat, selon lui.
Le porte-parole de la mission de maintien de la paix de l'ONU au Soudan du Sud (UNMISS), Kouider Zerrouk, a confirmé l'attaque sur le camp.
Le porte-parole de l'armée soudanaise n'était pas joignable.
Les agences humanitaires ont averti que les combats aggravaient une situation humanitaire déjà précaire.
Dans le camp de Yida, dans l'Etat d'Unité, à environ 25 km de la frontière soudanaise, quelque 400 réfugiés arrivent tous les jours, contre en moyenne 50 jusqu'à la semaine dernière, selon l'International Rescue Committee (IRC).
Les réfugiés fuient surtout les combats et la faim dans les montagnes du Nuba, au Kordofan-Sud.Selon l'organisation, l'aide y est bloquée par l'armée soudanaise.
Malgré les appels de la communauté internationale et une contre-offensive soudanaise annoncée vendredi, Juba a affirmé que ses forces ne se retireraient de Heglig qu'à condition que celles de Khartoum cessent leurs bombardements aériens et quittent la province voisine d'Abyei.
La facilité avec laquelle les Sud-Soudanais se sont emparées de Heglig pose question au Soudan et des députés ont estimé que ceux qui étaient responsables de sa "perte" devaient rendre des comptes.
"Comment avons nous pu perdre Heglig en quelques heures?" a lancé Samia Habani, une député devant ses collègues."C'est inacceptable".
Une telle prise est "rare dans l'istoire de l'armée soudanaise" et quelqu'un doit en être tenu pour responsable, a dit Alfa Hachem, député du Darfour.
Selon des experts, le ministre de la Défense Abdelrahim Mohammed Hussein est sur la sellette depuis la conquête de Heglig par l'armée sud-soudanaise.
Le contrôle de cette zone est crucial pour l'économie soudanaise, qui a perdu environ 75% de sa production pétrolière et des milliards de dollars de recettes avec la sécession du Soudan du Sud.
Le président du Soudan du Sud Salva Kiir effectuera du 23 au 28 avril une visite en Chine, un allié de longue date de Khartoum.
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