Le Somaliland, République autoproclamée du nord de la Somalie et rare îlot de stabilité de ce pays ravagé par une guerre civile depuis 1991, est menacé de déstabilisation par les insurgés islamistes shebab, opposés à la tenue des élections générales samedi.
Les shebab, qui se réclament de l'idéologie du jihad (guerre sainte) d'Al-Qaïda, ont menacé de représailles les habitants du Somaliland qui se rendraient aux urnes pour élire leur président et députés.
"Ceux qui prendront part à ces prétendues élections en subiront les conséquences", a mis en garde jeudi le chef des shebab Ahmed Abdi Godane, alias Abou Zubaïr.
"Vous n'avez que deux choix: soit vous suivez le chemin tracé par Allah, soit vous choisissez ce système démocratique soutenu par l'Occident infidèle.(...) Vous devez accepter le chemin d'Allah", a averti le leader islamiste, lui-même natif du Somaliland.
Si le report à trois reprises depuis 2008 du scrutin présidentiel a provoqué de vives tensions politiques dans la région, le Somaliland (3,5 millions d'habitants) se singularise toujours par sa stabilité et sa relative prospérité économique, basée essentiellement sur l'exportation de bétail.
La grande majorité de la population appartient au clan des Issak, ce qui a fortement contribué à éviter au territoire la situation chaotique du reste du pays, longtemps déchiré en guerres claniques avant l'irruption des shebab.
Impensable pour toute autre région du pays, le groupe français Bolloré faisait part en octobre 2009 de son intérêt pour investir dans le port de Berbera, le principal de la région, et déjà voie d'approvisionnement majeure de l'Ethiopie voisine, qui entretient des liens étroits avec le Somaliland.
Les élections de samedi, qui interviennent 50 ans jour pour jour après l'accession à l'indépendance de cette colonie britannique, doivent permettre aux autorités du Somaliland d'asseoir un peu plus le processus démocratique et de renforcer leurs efforts de reconnaissance internationale.
Rattaché à la Somalie italienne à l'indépendance de 1960, le Somaliland a fait sécession de la Somalie en mai 1991, cinq mois après la chute du président somalien Mohamed Siad Barre qui avait marqué le début de la guerre.La "République du Somaliland" tente depuis, en vain, d'obtenir une reconnaissance internationale.
Reste que les acquis des quelque 20 années d'autonomie de la région sont fragiles.
"Si les shebab prennent Mogadiscio et font flotter le drapeau noir sur la présidence, je pense qu'il ne faudra que quelques semaines, même pas des mois, pour que le Somaliland s'effondre", estime un diplomate installé dans la région.
Les shebab contrôlent la quasi-totalité du sud et du centre de la Somalie et ont déjà frappé au coeur du Somaliland, rendant leurs menaces crédibles.
En octobre 2008, 19 personnes avaient ainsi été tuées à Hargeisa, la capitale du territoire, dans des attentats-suicide menés par cinq kamikazes et revendiqués par les shebab.
Le 10 juin, les forces de sécurité ont arrêté 11 personnes en possession d'explosifs, soupçonnées de préparer des attentats-suicide.
L'existence même de ce territoire sécessionniste somalien va à l'encontre d'une vision largement partagée par l'insurrection islamiste mais aussi par une partie de la classe politique de Mogadiscio d'une "Grande Somalie", qui intègrerait le Somaliland, la région voisine et semi-autonome du Puntland ainsi qu'une partie de l'est de l'Ethiopie et du nord kényan.
Réagissant aux menaces des shebab sur les élections, des notables religieux du Somaliland ont appelé à "la vigilance".
"Nous devons être vigilants et prendre nos responsabilités pour assurer la sécurité de la nation durant ces élections", a déclaré cheikh Mohamed Abdi Arab, l'un de ces leaders.
"Vous devez tous être les yeux et les oreilles des forces de sécurité", a également lancé la Commission électorale à la population, dans un message radio-diffusé à Hargeisa.
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