Le vice-président kényan William Ruto pourra s'absenter de son procès pour crimes contre l'humanité devant la Cour pénale internationale (CPI) uniquement si des "circonstances exceptionnelles" l'y obligent, ont décidé vendredi les juges de la cour.
La chambre d'appel estime que la décision de la chambre de première instance, qui avait autorisé en juillet le vice-président kényan à être absent de la majorité des audiences, "doit être infirmée", a déclaré le juge Sang-Hyun Song.
Tout comme les autres accusés, William Ruto pourra néanmoins, en cas "de circonstances exceptionnelles", demander à être dispensé.
A la lumière de la décision des juges, l'avocat de William Ruto a demandé, alors que le procès avait repris son cours normal, que le vice-président puisse être dispensé de présence pendant trois jours pour pouvoir remplir ses fonctions de vice-président.
Le juge Eboe-Osuji a répondu favorablement à cette requête, le président Uhuru Kenyatta devant se rendre au Rwanda.
William Ruto, qui a quitté la cour vendredi vers 16H00 (14H00 GMT) après une ultime prière avec ses partisans présents à La Haye, devrait être de retour jeudi.
Celui-ci avait déclaré récemment qu'il voulait que son procès soit ajourné, ou qu'il continue en son absence, pour lui permettre de gérer la crise dans son pays suite à l'attaque sanglante contre un centre commercial de Nairobi fin septembre.
L'attaque menée par un commando armé lié à Al-Qaïda avait coûté la vie à au moins 67 personnes.Fin septembre, les juges avaient ajourné le procès de M. Ruto pour une semaine afin de lui permettre de rentrer au pays.
William Ruto, 46 ans, est le premier haut dirigeant en fonction à être jugé par la CPI.Son procès avait commencé le 10 septembre.
Lui et son co-accusé, le présentateur de radio Joshua Arap Sang, sont poursuivis pour leur rôle dans les violences post-électorales qui avaient déchiré le Kenya fin 2007-début 2008 et avaient fait plus de 1.000 morts et 600.000 déplacés.
Les juges avaient autorisé William Ruto à être absent de la majorité des audiences à cause de ses "fonctions exigeantes" en tant que vice-président, mais cette décision avait été suspendue suite à l'appel du procureur.
La cour est régulièrement sous le feu des critiques de l'Union africaine, qui a demandé à la mi-octobre l'ajournement des poursuites contre les deux têtes de l'exécutif kényan et l'immunité des chefs d'Etat.
Le président kényan Uhuru Kenyatta avait alors qualifié la cour d'"impérialiste" et raciste.Il avait également assuré que le Kenya allait se tourner vers le Conseil de sécurité des Nations unies afin d'obtenir une suspension des procédures pendant un an au minimum.
L'accusé est un "participant actif"
Pour le juge Sang-Huyn Song, un accusé n'est "pas uniquement un observateur passif du procès mais un participant actif".
En première instance, les juges avaient interprété le Statut de Rome, traité fondateur de la CPI, "de manière trop large", ont ajouté les juges, qui ont pris leur décision à la majorité.
Toute absence doit donc être limitée "au strict nécessaire" et les juges doivent avoir exploré d'autres possibilités au préalable, comme une modification de l'horaire ou un ajournement des procédures.
"Toute absence devrait être considérée au cas par cas", a précisé le juge Sang-Huyn Song.
La décision de juillet a procuré au vice-président kényan "une dispense générale avant même que le procès ait commencé, transformant son absence en règle générale et sa présence en une exception".
Si les juges décident, de manière exceptionnelle, de lui permettre d'être absent, "il faut veiller à ce que les droits de l'accusé soient pleinement respectés", en particulier grâce à la présence de son avocat, Karim Khan.
Le procès pour crimes contre l'humanité du président kényan Uhuru Kenyatta, lui aussi poursuivi pour ces violences les plus graves de l'histoire du Kenya indépendant, doit s'ouvrir le 12 novembre.
M. Kenyatta a également été autorisé en première instance à n'être présent qu'à certaines audiences, comme les déclarations liminaires ou les conclusions.
La décision de vendredi pourrait servir de jurisprudence pour un éventuel appel du procureur concernant M. Kenyatta.
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