Les islamistes égyptiens redoutent de se faire "briser les os" aux élections

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LE CAIRE (AFP)

Microphone au poing et coran à l'affiche, Mohamed Beltagui arpente le quartier de Choubra, au nord du Caire, dans l'espoir de conserver un siège de député acquis au nom des Frères musulmans, jouant sur son image de médecin proche des pauvres et d'homme pieux.

Mais il concède que la partie est loin d'être gagnée face aux "restrictions" de toutes sortes imposées par un pouvoir qui a juré que la confrérie islamiste ne rééditerait pas son succès de 2005, quand elle avait décroché un cinquième des sièges.

"Des conférences sont annulées, et même quand on va dans des cafés pour parler aux gens, le propriétaire est arrêté et le café fermé", assure l'élu, qui sillonne ce quartier de jour comme de nuit, en costume et cravate verte, la couleur de l'islam.Comme les 130 autres candidats soutenus par la confrérie, Mohamed Beltagui se présente comme "indépendant", le mouvement étant interdit en tant que parti.

Mais les responsables islamistes reconnaissent qu'il leur sera difficile de résister à l'offensive destinées à laminer leur groupe parlementaire.

Mehdi Akef, chef de la confrérie jusqu'au début de l'année, raconte qu'après les élections de 2005, un visiteur lui a transmis un message sans ambiguïté de la part des autorités: "ils disent qu'ils vont vous briser les os". Et aujourd'hui, "ils nous ont bien brisé les os", a-t-il déclaré à l'AFP.

Pour l'un des hauts dirigeants des Frères, Mahmoud Ezzat, boycotter les élections aurait été pire que de se présenter malgré tout.

"Si nous ne nous présentons pas, il y aura davantage de restrictions aux libertés", assure-t-il.

Des membres du gouvernement et du PND au pouvoir ont prévenu que les Frères musulmans ne connaîtraient pas le même succès électoral qu'en 2005, et multiplié les attaques contre leur groupe parlementaire. Les Frères ont assuré que quelque 1.200 d'entre eux avaient été arrêtés depuis l'annonce de leur participation au scrutin début octobre.Le pouvoir de son côté a fait savoir que des dizaines d'inculpations pour des motifs divers avaient été prononcées à la suite d'arrestations en marge de manifestations.

Le ministre de l'Intérieur, Habib el-Adli, les a visés implicitement en déclarant que "les manifestations ne font pas partie des mécanismes de la campagne électorale, et peuvent provoquer des émeutes".

Créée en 1928, la confrérie assure renoncer à la violence et privilégier la voie démocratique pour parvenir à instaurer un Etat fondé sur la loi islamique.Le pouvoir l'accuse de répandre une vision de l'islam rétrograde et intolérante.

Pour Amr Chobaki, du centre al-Ahram d'études politiques, les Frères sont aussi victimes de leur incapacité à incarner une alternative politique crédible.

"J'y vois l'échec de leur travail parlementaire, et compte tenu de leurs slogans religieux ils continuent d'être perçus par certains comme une menace pour la société civile", assure-t-il.

Le retour en force de membres de la "vieille garde" la plus conservatrice des Frères, lors d'une intense bataille interne en début d'année, n'a pas non plus amélioré leur image, assure-t-il.

Pour certains spécialistes, un revers électoral ne serait toutefois pas insurmontable pour les Frères, capables de se replier sur leur domaine de prédilection : l'action sociale et religieuse auprès de la population.

"Cela ne va pas diminuer l'influence des Frères dans la rue, parce qu'ils ne comptent pas juste sur leur présence au Parlement, mais sur les services sociaux et les mosquées", assure le politologue égyptien Moustapha Kamal.

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