Du Cap à Johannesburg, en passant par Pretoria, les rues d'Afrique du Sud étaient pleines vendredi de dizaines de milliers de manifestants réclamant le départ de Jacob Zuma dont un remaniement gouvernemental controversé a déstabilisé l'économie et la politique du pays.
Le mouvement de vendredi, qui réunissait sympathisants de l'opposition, militants de la société civile et simples citoyens excédés par la politique de M. Zuma, est l'une des plus grandes manifestations politiques de ces dernières années en Afrique du Sud.
A Johannesburg, environ 10.000 partisans de l'Alliance démocratique (DA), le principal parti d'opposition, se sont réunis dans le centre-ville, emmenés par leur dirigeant, Mmusi Maimane.
�??C'est un grand jour où les Noirs, les Blancs, les Asiatiques, les Métis peuvent se rassembler.Un homme ne peut ignorer 55 millions de Sud-Africains.Nous allons récupérer l'Afrique du Sud ensemble", a lancé le jeune chef de l'opposition de 36 ans.
Fait rare en Afrique du Sud, quelques centaines d'habitants - principalement Blancs - vivant dans les quartiers les plus huppés du nord de Johannesburg ont également manifesté aux carrefours des principales artères de la capitale économique sud-africaine en brandissant des panneaux "Zuma doit partir".
A Pretoria, le parti communiste sud-africain, pourtant allié historique du Congrès national africain (ANC, au pouvoir), a organisé une marche vers le palais présidentiel, rejoint par des membres de la société civile toujours pour demander le départ de M. Zuma.
- Desmond Tutu aussi -
Même le prix Nobel de la Paix et ancien archevêque Desmond Tutu, figure de la lutte anti-apartheid, est sorti manifester dans la ville d'Hermanus, à une centaine de km du Cap, malgré sa santé fragile et ses 85 ans.
Des partisans du président Zuma, ainsi que des dizaines d'anciens combattants de l'ANC, se sont quant à eux rassemblés autour du siège du parti à Johannesburg.
La popularité du président sud-africain est en berne depuis plusieurs mois en raison de nombreux scandales de corruption dans lesquels le nom de M. Zuma revient.Il est notamment accusé de favoriser les intérêts d'une sulfureuse famille d'hommes d'affaires, les Gupta.
Des manifestants pro et anti-Zuma se sont d'ailleurs affrontés verbalement devant la résidence de la famille Gupta à Johannesburg avant d'être dispersés à coups de grenades lacrymogènes par la police, selon un correspondant de l'AFP.
La semaine dernière, le président sud-africain a nommé dix ministres et autant de vice-ministres, la plupart considérés comme ses proches.Pravin Gordhan, ministre des Finances connu pour sa probité et pour sa lutte contre la corruption, a fait les frais de ce remaniement d'ampleur, remplacé à son poste par Malusi Gigaba, un fidèle de Jacob Zuma.
- Dégradation de la note -
Vendredi, l'agence de notation financière Fitch Ratings a abaissé la note souveraine de l'Afrique du Sud en catégorie spéculative, la faisant passer de "BBB-" à "BB+".
Cette note avait déjà été placée en catégorie spéculative lundi par une autre agence, Standard and Poor's, quelques jours après le remaniement.
"Ce remaniement pourrait saper, si ce n'est inverser, les progrès effectués dans la gouvernance des entreprises publiques, ce qui augmente le risque de voir la dette de ces entreprises peser sur les comptes publics", relève Fitch Ratings dans un communiqué.
Si l'opposition est vent debout contre Jacob Zuma, ce remaniement a aussi causé des remous au sein même de l'ANC.Plusieurs cadres se sont élevés contre ce coup de force du président avant de finalement rentrer dans le rang, quand le parti a réaffirmé mercredi son soutien au chef de l'Etat.
Jacob Zuma devra néanmoins affronter devant le Parlement un vote de défiance demandé par l'opposition, le 18 avril.
L'ANC a d'ores et déjà donné la consigne à ses députés de voter contre et le président devrait donc profiter de sa large majorité (249 sur 400 députés) pour éviter la destitution.
Pour l'heure, le calendrier du parti reste donc inchangé: il se choisira un nouveau chef de file à la place de Jacob Zuma, en décembre.Le vainqueur sera le candidat du parti pour les élections générales de 2019 qui désigneront un nouveau président.
Si le désamour populaire envers l'ANC se poursuit, le parti pourrait perdre sa majorité absolue au Parlement lors de ce scrutin, ce qui serait une première depuis son arrivée au pouvoir, à la fin de l'apartheid en 1994.
Deux factions s'opposent au sein du parti: les pro-Zuma soutiennent son ex-épouse Nkosazana Dlamini-Zuma, tandis que les frondeurs sont rangés derrière l'actuel vice-président Cyril Ramaphosa.
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