Trois hommes, dont au moins un Français, soupçonnés par la foule d'avoir tué et mutilé un enfant ont été lynchés jeudi sur l'île touristique malgache de Nosy Be.
Deux Européens ont été tués et leurs corps brûlés tôt dans la matinée sur la plage d'Ambatoloaka, la principale station balnéaire de Nosy Be. Des photos parvenues à l'AFP montrent un bûcher encore fumant où l'on reconnaît des jambes et un torse humains.
A Antananarivo, la gendarmerie malgache a indiqué que les deux victimes étaient des citoyens français, prénommés Sébastien et Roberto.
Le ministère français des Affaires étrangères a indiqué que l'un des deux Européens au moins était un Français.Selon des sources sur place, l'autre serait de nationalité italienne, ce que n'a pas pu confirmer Rome immédiatement.Selon un restaurateur italien contacté par l'AFP sur place, il serait plus vraisemblablement italo-français.
Les deux hommes ont été décrits par des habitants de l'île comme des marginaux.
Dans la soirée, et dans une atmosphère d'émeute, quelques hommes ont amené un Malgache dans une Renault 4, l'en ont sorti et ont jeté son corps dans un brasier devant quelque 300 personnes en délire, a constaté une journaliste de l'AFP.
Il n'était pas possible de savoir si l'homme était encore vivant ou déjà mort lorsqu'il a été jeté au feu, dans un quartier périphérique de Hell-Ville, la petite capitale de l'île.
Théâtre de violences depuis la veille, Hell-Ville était sens dessus-dessous jeudi en fin d'après-midi: des gens se déplaçaient en hurlant à travers la ville, où des barrages en flammes barraient certaines rues.
La foule cherchait cet homme, un Malgache qui serait l'oncle du garçon selon le chef du district, depuis mercredi.Convaincue qu'il était détenu à la gendarmerie de Hell-Ville, elle avait alors fait le siège du bâtiment.Les gendarmes avaient ouvert le feu pour disperser les manifestants, faisant un mort et deux blessés.
"Trafic d'organes"
Jeudi matin, "le corps sans vie du garçon de 8 ans, disparu vendredi, a été retrouvé", sans ses organes génitaux, et sans sa langue, a affirmé à l'AFP l'adjoint du commandant de la gendarmerie nationale, le général Guy Bobin Randriamaro.
Selon lui, les deux Européens lynchés ont avoué sous la torture des émeutiers "avoir commis des trafics d'organes".La gendarmerie n'a pas clarifié la nature des soupçons, et n'a pas indiqué si le "trafic d'organes" était lié à un trafic à but médical ou à des pratiques locales de sorcellerie.
"Ces histoires de trafic d'organes ou de corps découpés ne sont que des rumeurs.Le corps de l'enfant disparu a été retrouvé hier soir (mercredi soir, ndlr) sur la plage après avoir été ramené par la mer.Il était habillé", a de son côté raconté au journal Le Parisien un Français habitant sur place.
Ce témoin dit avoir assisté au lynchage des deux Européens tôt jeudi matin: "Ca m'a réveillé.J'ai vu une foule énorme arriver, je dirais entre 3.000 et 4.000 personnes, y compris des femmes et des enfants.Les deux hommes ont été tabassés puis jetés sur un brasier.C'est quelque chose d'atroce à vivre.Malheureusement, il était impossible d'intervenir", a-t-il raconté.
La population locale s'inquiétait depuis quelques jours de la disparition de plusieurs enfants, neuf selon la rumeur, et des avis de recherche avaient été placardés avant le drame, a noté le restaurateur d'Ambatoloaka.
"C'est un événement malheureux et regrettable, mais il ne vise en aucun cas ni les touristes ni même les étrangers, mais des individus bien identifiés", a rassuré Vola Raveloson, directrice de l'Office du tourisme de Madagascar, ajoutant que la population locale "connaît l'enjeu d'un maintien de l'ordre sur place".
Les plages de Nosy Be et leurs eaux cristallines sont la principale destination touristique de Madagascar.
Alors que les autorités ont envoyé des renforts de gendarmerie sur place, le consulat de France a enjoint aux Français de rester confinés à leur domicile où à leur hôtel, faisant état du "risque des violences à Hell-Ville ce soir et cette nuit" (de jeudi à vendredi).
Les lynchages publics ne sont pas rares à Madagascar.Des voleurs présumés ou des conducteurs impliqués dans des accidents mortels ont récemment été lynchés et brûlés vifs.Les foules n'hésitent pas non plus à attaquer les commissariats ou gendarmeries pour essayer d'en extraire les criminels présumés et les lyncher.
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