Chargés de surveiller le bon déroulement de l'élection présidentielle de vendredi à Madagascar, les observateurs de l'Union européenne ont déjà recensé un certain nombre de problèmes, liés notamment aux difficultés de préparation du scrutin dans les zones isolées.
"Il y a vraiment un effort de l'administration électorale pour que les choses se passent bien", dit cependant très diplomatiquement la chef de la mission européenne Maria Muniz de Urquiza.
Sous la direction de cette députée européenne (socialiste) espagnole, l'UE a déployé 94 observateurs sur la Grande Ile.Une mission de quatre mois qui ne s'achèvera qu'en janvier à l'annonce des résultats définitifs du probable second tour et des législatives (organisées le 20 décembre).
Mme Muniz de Urquiza rencontrait mardi des responsables locaux et responsables de la société civile à Diego Suarez (officiellement Antsiranana), dans l'extrême nord du pays.
Cette brève visite lui a permis de constater que les questions soulevées restent les mêmes partout: "l'acheminement du matériel électoral, le stockage du matériel électoral d'une façon sécurisée.C'est difficile dans des endroits enclavés ou qui sont très éloignés!".
"Tout sera prêt vendredi!"
De son côté, la présidente de la commission électorale locale, Samsia Kara, se veut rassurante: "tout sera prêt vendredi!".
La région est montagneuse, et de nombreuses localités sont très isolées.Une fois à bon port, une préoccupation des observateurs européens et locaux est le stockage des documents et des bulletins de vote --théoriquement gardés sous scellés jusqu'au vote--, qui sont confiés aux chefs de "fokontany" (quartier ou village).
Or, ceux-ci sont-ils toujours fiables?Une partie d'entre eux viennent de bloquer la distribution des cartes d'électeurs à la population car ils réclamaient des arriérés de paiement.
"La distribution des cartes est en cours, il en reste encore, mais les agents électoraux font leur travail au niveau des fokontany", assure Mme Kara.
La responsable de la commission électorale ajoute que les électeurs dûment inscrits pourront de toute façon voter avec leur carte d'identité.
"Tout ceux qui ne sont pas sur la liste (électorale), ce sont des gens qui ne veulent pas être inscrits", ajoute-t-elle.Ces gens représentent plus de 50% de la population, glisse ensuite un observateur européen.
Autre préoccupation, l'absence de campagne d'éducation civique, alors que les Malgaches vont pour la première fois voter avec un bulletin unique sur lequel il devront choisir parmi les 33 candidats en lice.
"Le principal problème, c'est que les gens n'ont pas été sensibilisés au bulletin unique.En brousse, surtout, ce n'est pas facile", regrette Toto Landry, responsable d'une ONG locale.
Des villages oubliés de la campagne électorale
Des villages sont même tellement isolés qu'ils ont étés oubliés par la campagne électorale."Dans certains endroits, les gens ne connaissent pas les candidats.Il vont tirer au sort", témoigne Benoît Tokiniaina, vice président de l'organisation d'éducation civique KMF-CNOE.
L'Union européenne a déployé des observateurs à travers tout le territoire: il s'agit à chaque fois d'un binôme binational, qui doit parler la langue du pays (le français à Madagascar), accompagné d'un interprète (pour le malgache) et d'un chauffeur.
"Normalement, selon la méthodologie de l'UE, chaque équipe doit visiter 10 à 15 bureaux de vote.On aura ainsi un échantillon représentatif de 2 à 3% des bureaux de vote du pays", précise Sandrine Espinoza, numéro deux de la mission européenne.
Les observateurs européens donneront leurs premières impressions vendredi, puis feront un point plus précis dimanche.
Ils ne sont pas seuls sur place, puisque l'Union africaine, la Communauté de développement d'Afrique australe (SADC), l'Organisation internationale de la Francophonie (OIF), la Commission de l'océan Indien (COI) ou la Fondation Carter sont également présents.Et des ONG malgaches comptent déployer 5.000 personnes dans les bureaux de vote.
"Nous nous coordonnons", indique Maria Muniz de Urquiza."Mais nous maintenons notre méthodologie et notre indépendance."
"Nous sommes ici à l'invitation des autorités du pays", tient-elle aussi à rappeler pour balayer toute accusation d'ingérence.
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