L'ambiance restait électrique mercredi au Malawi après la présidentielle contestée du 20 mai, le frère du défunt président Bingu wa Mutharika, sûr de sa victoire, accusant la commission électorale de prendre le pays "en otage" en voulant recompter les bulletins.
Si la justice en décide, les résultats pourraient toutefois être annoncés dès vendredi.
L'ancien ministre des Affaires étrangères Peter Mutharika, 74 ans, pense tenir sa revanche sur la présidente Joyce Banda, au pouvoir depuis 2012 et qui dénonce des fraudes lors du scrutin dans ce petit pays pauvre d'Afrique australe.
Il sortirait largement en tête du scrutin présidentiel, avec 36% des suffrages, a indiqué à l'AFP un responsable proche de la commission électorale, sous couvert de l'anonymat, après la fin du dépouillement.
Le candidat de l'ancien parti unique du dictateur Kamazu Banda, Lazarus Chakwera, serait deuxième avec 28%, et Mme Banda seulement troisième avec 20%, victime notamment de l'impopularité de ses mesures d'austérité économique.
Dans l'attente des résultats officiels, la tension monte.
La police anti-émeute est intervenue dans la capitale économique Blantyre pour disperser une trentaine de manifestants munis de branches d'arbres qui réclamaient la publication immédiate des résultats.
"Nous les avons empêchés d'accéder au centre de traitement des résultats et le calme est revenu en ville", a déclaré le porte-parole de la police Nicholas Gondwa à l'AFP.
C'est jeudi que la justice devrait examiner la légalité de l'opération de recomptage des bulletins, décidée par la commission électorale mais furieusement contestée par le camp Mutharika.
Le juge Healy Potani devrait ensuite trancher vendredi avant 16H00 (14H00 GMT).
D'ores et déjà, le président de la commission électorale, Maxon Mbendera, a choisi de calmer le jeu.La commission "se prépare à annoncer les résultats de ces élections le vendredi 30 mai, ou selon ce qu'ordonnera la cour", a-t-il dit lors d'une conférence de presse, en exhortant "à la paix et au calme".
Entre M. Mutharika et la présidente, le contentieux est ancien.Il avait tenté de succéder à son frère, brutalement décédé d'une crise cardiaque en avril 2012, intriguant même, selon une enquête menée depuis, pour écarter Mme Banda, vice-présidente de l'époque et héritière légitime du pouvoir selon la Constitution.Il a été inculpé pour haute trahison.
Joyce Banda, au pouvoir depuis le décès du président Bingu wa Mutharika, dénonce des fraudes dans la présidentielle à un tour du 20 mai, couplée aux législatives et aux municipales.
Elle a tenté d'annuler le scrutin, s'attirant les foudres de la justice qui a invalidé sa décision sans pour autant avoir le dernier mot: Mme Banda pourrait encore faire appel.
- Trente jours pour recompter -
La commission électorale a donné en partie raison à Mme Banda, en trouvant plus de suffrages exprimés que d'inscrits dans une soixantaine de bureaux.
Les résultats de ces bureaux ont été isolés et "nous les examinons sérieusement pour chercher d'éventuelles erreurs", a assuré mardi le président de la commission électorale.
Il s'était donné trente jours pour recompter tous les bulletins.Mais cette initiative a ulcéré le clan Mutharika.
"La loi est très claire et donne huit jours à la commission électorale pour déterminer le résultat des élections.Les Malawites sont pris en otage par l'autorité électorale", a tempêté l'avocat de M. Mutharika, Kalekeni Kaphale.
Le scrutin connaît depuis le début des ratés spectaculaires, avec des problèmes d'organisation considérables le jour du vote puis dans le comptage, qui ont tourné à l'imbroglio constitutionnel et juridique.
Des incidents ont eu lieu, mais uniquement le jour du vote, et ils sont restés isolés.
"J'aime cette idée de recompter les bulletins, car cela ôtera tous les doutes", commentait ces jours-ci une marchande ambulante, Margaret Tamale, 36 ans, dans un faubourg de Blantyre.
Un autre Malawite, employé d'une fabrique de matelas, était d'avis contraire, estimant que le recomptage est "une perte de temps et d'argent inutile dans un pays aussi pauvre que le nôtre".
Près de la moitié des 15 millions de Malawites vivent avec moins d'un dollar par jour.
Forte d'une image intègre et courageuse à son arrivée, Mme Banda s'est fait des ennemis en dévaluant le kwacha et quand un grand scandale de corruption, le "Cashgate", a éclaté en octobre dernier.Elle-même nie toute implication.
Envie d'afficher votre publicité ?
Contactez-nousEnvie d'afficher votre publicité ?
Contactez-nous
L'espace des commentaires est ouvert aux inscrits.
Connectez-vous ou créez un compte pour pouvoir commenter cet article.