Les rebelles touareg sont entrés dimanche dans Tombouctou dont la chute annoncée consacre leur main mise sur la quasi-totalité du nord-est du Mali, tandis qu'à Bamako la junte militaire en déroute promettait son retrait et un gouvernement de transition sans toutefois fixer de calendrier.
"Les rebelles sont dans Tombouctou.Au moment où je parle, je les vois (se diriger) vers une banque de la ville", a déclaré un habitant, interrogé depuis Bamako.Son témoignage a été confirmé par plusieurs autres sources précisant qu'on entendait peu de coups de feu.
Selon des sources concordantes, les rebelles ont négocié leur entrée.Des contacts ont été pris avec une milice arabe loyaliste qui avait pris position après la défection de la plupart des soldats maliens.
Des militaires ont renversé le 22 mars le président malien Amadou Toumani Touré qu'ils accusent d'avoir été incapable d'endiguer l'offensive de la rébellion touareg déclenchée en janvier dans le nord désertique du Mali.
Mais malgré le putsch, l'avancée des Touareg, soutenus par des groupes islamistes, s'est amplifiée sans rencontrer de résistance au cours des derniers jours, menaçant de couper le pays en deux.
Après s'être emparés dans la nuit de Gao, capitale régionale du Nord Mali, les rebelles ont avancé dimanche sur Tombouctou où des tirs d'armes lourdes avaient visé dans la matinée le camp militaire.Celui-ci avait été déserté par les soldats, dont beaucoup ont abandonné leurs uniformes et quitté leurs positions sur les points stratégiques, selon des habitants.
Selon les miliciens loyalistes, plusieurs groupes rebelles participent à l'encerclement de Tombouctou, le Mouvement national pour la libération de l'Azawad (MNLA) - principale composante de la rébellion - et des islamistes.
Dans un communiqué, le MNLA avait affirmé que son "état-major cernait" Tombouctou, une ville historique située à environ 800 km au nord-est de Bamako et inscrite au patrimoine mondial de l'Unesco.
Dans la nuit de samedi à dimanche, les rebelles avaient pris le contrôle total de la ville de Gao, 300 km plus à l'est, et de ses deux garnisons militaires, après une journée de combats et la fuite de l'armée, selon des sources concordantes.
Promesses de transition et d'élections
A un millier de kilomètres au nord-est de Bamako, Gao, 90.000 habitants, abritait l'état-major des forces gouvernementales pour toute la région Nord.
Dans la capitale, la junte sous pression et en déroute, a promis dimanche une transition vers des élections dont la date n'a pas été précisée.
"Nous prenons l'engagement solennel de rétablir à compter de ce jour la Constitution (...) ainsi que les institutions républicaines", a déclaré à la presse le chef des putschistes, le capitaine Amadou Sanogo.
Il a annoncé "des consultations avec toutes les forces vives du pays dans le cadre d'une convention nationale" sous les auspices des pays l'Afrique de l'Ouest pour permettre "la mise en place d'organes de transition en vue de l'organisation d'élections apaisées, libres, ouvertes et démocratiques".
Il a confirmé que la junte n'y participerait pas, mais sans préciser la durée ni les termes exacts de cette transition.
Le chef de la junte s'exprimait au côté du médiateur ouest-africain, le chef de la diplomatie burkinabè Djibrill Bassolé, présent à Bamako depuis samedi pour négocier avec les mutins des modalités d'un retour de l'ordre constitutionnel, exigé par les pays de la région.
Après avoir brandi la menace d'un "embargo diplomatique et financier" d'ici lundi, la Communauté économique des Etats de l'Afrique de l'Ouest (Cédéao), a mis samedi une force d'intervention de 2.000 hommes en "alerte".
Avant même leur entrée dans Tombouctou, l'avancée des rebelles, qui ont tiré profit de la désorganisation au sein des forces armées, a été foudroyante.
Depuis le début de leur offensive mi-janvier, ils contrôlaient déjà une grande partie du nord-est malien.
En trois jours, ils ont pris le contrôle des principales villes de la région qui leur échappaient encore, Kidal, Ansongo, Bourem.
Plusieurs groupes armés prennent part à l'offensive en cours à côté du MNLA, en particulier le groupe islamiste Ansar Dine du chef touareg Iyad Ag Ghaly, principal artisan de la prise de Kidal.
Selon certaines sources, des éléments d'Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi) sont présents, ce que le MNLA, d'obédience laïque, dément régulièrement.
Le "Mouvement pour l'unicité et le jihad en Afrique de l'Ouest" (Mujao), une dissidence d'Aqmi dirigée par des Maliens et des Mauritaniens, a également revendiqué sa participation à l'attaque de Gao.
Ces différents groupes se partageaient dimanche le contrôle de la ville.
Les portes de la prison civile ont été ouvertes de force par des inconnus, et plusieurs bâtiment publics ont été saccagés.
"Aujourd'hui, dimanche, il y a de nombreuses scènes de pillages.Nous avons vu le siège du CICR pillé, saccagé par les rebelles.La banque, le trésor, plusieurs bâtiments ont été détruits", a précisé Ali Diarra, fonctionnaire à la préfecture.
"Moi, j'ai vu les barbus allés casser des hôtels comme le mien et des bars (...), criant que Dieu n'aime pas l'alcool", a témoigné un hôtelier.
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