L'écrivain nigérian Wole Soyinka considére le chef de Boko Haram comme "une obscénité", probablement incapable de dialoguer, au moment où le gouvernement nigérian se dit prêt à négocier avec le groupe islamiste pour obtenir la libération des 200 lycéennes captives.
Le lauréat du prix Nobel de littérature de 1986, interrogé par l'AFP depuis Los Angeles, a estimé que Abubakar Shekau était "très religieux et très drogué".
"Pour moi, nous avons affaire à une espèce inférieure à l'être humain, comment peut-on dialoguer avec une telle obscénité?" a déclaré M. Soyinka.
La question de savoir s'il faut négocier ou non avec Boko Haram et avec Shekau divise l'opinion au Nigeria, où l'insurrection islamiste a fait plusieurs milliers de morts ces cinq dernières années.
Le débat a refait surface lundi, quand Shekau a suggéré, dans une vidéo, que les adolescentes enlevées mi-avril à Chibok, une ville reculée du Nord-Est, pourraient être libérées en échange de prisonniers islamistes.
"C'est un casse-tête pour la Nation, parce que ces jeunes filles doivent être sauvées", reconnaît Soyinka, qui dit comprendre la difficulté du choix des autorités: dialoguer ou pas avec Shekau.
Le rapt massif de Chibok a suscité une immense vague d'émotion et de solidarité à travers le monde, notamment via les réseaux sociaux.
Des personnalités de haut rang, telle que la première dame des Etats Unis, Michelle Obama, et le pape François, ont manifesté leur soutien aux captives.
Le président nigérian Goodluck Jonathan a accepté l'aide des Etats-Unis, de la Grande Bretagne, de la France, d'Israël et de la Chine pour tenter de retrouver les jeunes filles.
Pour certains commentateurs, cette aide internationale est embarrassante, pour un pays qui se targue d'être la première puissance économique du continent africain.
Mais pour M. Soyinka, les auteurs de ces critiques manquent de compassion envers les adolescentes enlevées.
"Dans ce genre de situation, où on fait face à de tels meurtriers, des maniaques de l'homicide qui sont capables de se rendre dans une école et d'enlever des centaines de filles (...) toute aide est la bienvenue", a estimé M. Soyinka.
Pour la communauté internationale, "ce n'est pas une faveur", "c'est un devoir", a-t-il ajouté.
Des manifestations sont organisées tous les jours à Abuja, la capitale fédérale, et dans d'autres villes du pays, pour demander la libération des jeunes filles.
Un tel militantisme est peu commun au Nigeria, où seules les manifestations géantes contre le retrait des subventions sur l'essence avaient défrayé la chronique en paralysant tout le pays en janvier 2012.
Quelques manifestations en faveur des jeunes filles de Chibok ont déjà été perturbées par l'intervention de policiers.
Pour M. Soyinka, le président ne doit surtout pas empêcher le peuple d'exprimer sa tristesse et sa colère.
M. Jonathan et son administration "doivent faire très, très attention, parce que les gens souffrent depuis très, très longtemps", prévient M. Soyinka.
Et si les manifestations continuent, le gouvernement "ferait mieux de ne pas essayer de les empêcher", estime-t-il.
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