Le chef de l'Etat sortant Denis Sassou Nguesso est en tête de la présidentielle avec 67,02% des voix, selon des résultats partiels annoncés mardi deux jours après un scrutin contesté par l'opposition.
M. Sassou Nguesso, qui a passé plus de 32 ans à la tête du pays, briguait dimanche un nouveau mandat face à huit candidats, dans un pays privé de télécommunications sur ordre des autorités.
L'élection intervient quelques mois après un changement de Constitution que ses détracteurs ont qualifié de "coup d'Etat constitutionnel".
Jugeant à l'avance le scrutin biaisé, cinq candidats d'opposition ont appelé le peuple à "exercer sa souveraineté" si le président sortant l'emporte dès le premier tour, comme celui-ci l'a promis à ses partisans.
La communauté internationale, inquiète de possibles violences, a appelé au calme les différentes parties.
Les résultats provisoires publiés portent sur 59% du corps électoral et ne comprennent pas ceux de Pointe-Noire, la capitale économique du pays et bastion de l'opposition, a précisé le président de la Commission nationale électorale indépendante (CNEI), Henri Bouka.
La CNEI place en deuxième position le candidat d'opposition Guy-Brice Parfait Kolélas avec plus de 16% des voix, devant le général Jean-Marie Michel Mokoko, autre candidat d'opposition (plus de 7%).
"Attendons d'avoir le détail [des résultats définitifs ] mais à ce stade, on peut anticiper sur une victoire au premier tour", à réagi devant la presse Thierry Moungalla, porte-parole de l'équipe de campagne du président et du gouvernement.
Dans le centre de la capitale, des groupes de quelques dizaines de partisans du chef de l'Etat manifestaient leur joie à pied ou en voiture en début de soirée.
Dans les quartiers sud où M. Kolélas écrase les autres candidats, des journalistes de l'AFP ont constaté un fort déploiement de policiers et militaires lourdement armés dans des rues vides.
La plupart des boutiques avaient fermé dans l'après-midi, la population semblant redouter des troubles après l'annonce des résultats partiels.
L'opposition a créé une "commission technique" parallèle (CTE) pour surveiller le déroulement du vote et compiler ses propres résultats, une initiative qualifiée d'"illégale" par le pouvoir.
Sur ordre du gouvernement, toutes les télécommunications sont coupées dans le pays depuis dimanche pour des raisons de sûreté nationale, afin d'empêcher l'opposition de diffuser ses résultats.
- 'Burundisation' du Congo -
"Ce scrutin s'est déroulé dans un contexte préoccupant", a déclaré le porte-parole du Quai d'Orsay, Romain Nadal, soulignant la "vigilance" de la France et son "attachement à la transparence et à l'équité du processus électoral à toutes ses étapes".
L'Union européenne a de son côté encouragé "tous les acteurs politiques à recourir aux voies légales pour résoudre leurs différends" et appelé les autorités à rétablir les moyens de communication.L'UE n'a pas envoyé d'observateur, estimant que les conditions d'un scrutin "démocratique" et "transparent" n'étaient pas réunies.
L'ONU avait aussi appelé au calme, exhortant "les partis politiques, les candidats et leurs partisans à résoudre les différends qui pourraient survenir par le dialogue et les procédures légales établies".
Affirmant avoir noté "de nombreux rapports d'irrégularités qui constituent une source d'inquiétude quant à la crédibilité du processus" électoral, le département d'Etat américain a demandé "à tous les dirigeants politiques (congolais de) renoncer à la violence et appeler leurs partisans au calme", et plaidé lui aussi pour le rétablissement des communications.
Pour le porte-parole du gouvernement, Thierry Moungalla, au contraire, "malgré toutes les craintes ou toutes les spéculations (...) le peuple congolais s'est rendu massivement aux urnes de manière très calme et sereine"."Cette élection va marquer d'abord l'élection d'un président à la légitimité incontestable", a-t-il ajouté, disant souhaiter "que l'ensemble des acteurs politiques (ne gâchent) pas la belle fête démocratique du 20 mars".
Du côté de l'opposition, des divergences notables semblent apparaître.Dans l'équipe de campagne de M. Kolélas, on fait part d'"inquiétudes", certains opposants se disant prêts à en découdre avec le pouvoir dans la rue.
M. Kolélas a promis de contester les résultats, si besoin était, par des voies légales.
"La crainte, c'est que le pays implose.Nous ne voulons pas d'une burundisation du Congo", explique un de ses proches, alors que, devant la presse étrangère, Charles Zacharie Bowao, coordonnateur de la plate-forme soutenant les cinq candidats d'opposition affirme : "Nous défendrons les résultats des urnes, y compris au risque de notre vie.Nous ne laisserons pas la victoire du peuple être confisquée".
Dans les rues de Brazzaville, comme la veille, l'affluence était moindre qu'à l'habitude mardi.Plusieurs habitants font part des craintes d'une partie de la population toujours hantée par le spectre des guerres civiles de la décennie 1990 et du début des années 2000, ou marquée par le souvenir plus récent des troubles meurtriers ayant accompagné la campagne référendaire d'octobre.
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