Rapt de lycéennes: Boko Haram exige un échange, le Nigeria refuse

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Lagos (AFP)

Boko Haram a exigé lundi dans une vidéo la libération de prisonniers du groupe islamiste en échange de celle des quelque 200 lycéennes enlevées mi-avril dans le nord-est du Nigeria, une demande fermement rejetée par le pouvoir nigérian.

En pleine mobilisation internationale pour sauver les jeunes filles, Boko Haram a diffusé une nouvelle vidéo obtenue par l'AFP: elle montre une centaine de jeunes femmes présentées comme faisant partie des lycéennes kidnappées, et filmées lors d'une prière collective.

Le chef du groupe armé, Abubakar Shekau, parle pendant 17 minutes dans la vidéo et apparaît souriant, en tenue militaire et avec une kalachnikov appuyée sur son épaule.

S'exprimant en arabe puis en haoussa, la langue la plus parlée dans le nord du Nigeria, il revendique à nouveau le rapt massif de Chibok.

Au total, 276 lycéennes avaient été enlevées le 14 avril à Chibok, dans l'Etat de Borno (nord-est), l'un des fiefs de Boko Haram, parmi lesquelles 223 restent captives.Majoritairement musulman, cet Etat abrite néanmoins une communauté chrétienne importante.Onze autres jeunes filles ont été enlevées le 4 mai, dans une autre localité du même Etat.

Alors qu'il avait menacé de traiter les jeunes filles en "esclaves" dans une précédente vidéo, Shekau affirme cette fois avoir converti les otages à l'islam.

"Ces filles dont vous vous préoccupez tant, nous les avons en fait libérées (...) et vous savez comment on les a libérées?Ces filles sont devenues musulmanes", dit-il.

 

- Non aux "conditions" -

 

"Nous ne les libérerons qu'après que vous ayez libéré nos frères" emprisonnés par les autorités nigérianes, ajoute-t-il.

Shekau précise qu'un tel échange ne concernerait que "celles qui ne se sont pas converties" à l'islam, celles ayant accepté de devenir musulmanes étant devenues "des soeurs".

Le gouvernement a aussitôt opposé une fin de non-recevoir à cette exigence.

"Ce n'est pas à Boko Haram et aux insurgés de poser leurs conditions", a déclaré le ministre de l'Intérieur Abba Moro à l'AFP."Il n'est pas question d'échanger une personne contre une autre".

La nouvelle vidéo de Boko Haram montre environ 130 adolescentes assises à l'air libre sous des arbres, dans un lieu non-identifié, en train de réciter ensemble la "fatiha", l'une des principales sourates du Coran.

Les jeunes filles sont habillées de longs voiles noirs et gris laissant juste leurs visages découverts.Trois d'entre elles sont interrogées: deux disent qu'elles étaient chrétiennes et se sont converties à l'islam, alors que la troisième déclare qu'elle était déjà musulmane. 

L'une des filles affirme, le regard fuyant et visiblement sous la contrainte, que les captives ne sont pas maltraitées.

A aucun moment de la vidéo, qui dure 27 minutes au total, Shekau n'apparaît en compagnie des lycéennes, qui ont l'air abattues, résignées, mais pas terrifiées.

 

- Mobilisation mondiale -

 

La diffusion de cette nouvelle vidéo intervient alors que la mobilisation mondiale en faveur des lycéennes ne cesse de grandir.

Boko Haram, dont le nom en langue haoussa signifie +L'éducation occidentale est un péché+, a multiplié, depuis le début de son insurrection en 2009, les attaques contre les écoles.Mais l'enlèvement massif des lycéennes, suivi d'une revendication vidéo où Abubakar Shekau menaçait de les traiter comme des "esclaves", de les "vendre sur le marché" et de les "marier" de force, a scandalisé l'opinion internationale et suscité une vague de solidarité.

Après les Etats-Unis, le Royaume-Uni et la France qui ont envoyé ces derniers jours des experts au Nigeria, Israël a à son tour proposé son aide dimanche, comme l'avait fait la Chine vendredi. 

Dimanche soir, François Hollande a proposé un sommet sur la sécurité au Nigeria, qui devrait rassembler samedi prochain à Paris, autour du président français, les dirigeants d'au moins cinq pays africains : le Nigeria et quatre de ses voisins, le Tchad, le Cameroun, le Niger et le Bénin.

En fin de semaine dernière, le président nigérien Mahamadou Issoufou s'est entretenu avec une responsable américaine du "problème Boko Haram".

Les manifestations se poursuivent à travers le monde.A Dakar, un collectif d'organisations de femmes et de défense de droits de l'Homme a manifesté lundi près de l'ambassade du Nigeria, pour exprimer "solidarité" et "indignation".

Très critiqué pour son inaction dans les jours qui ont suivi l'enlèvement, le président nigérian Goodluck Jonathan s'est dit "très optimiste" sur l'opération de recherche en cours, grâce à l'appui logistique de la communauté internationale.

Selon un rapport d'Amnesty International, l'armée nigériane avait été informée de l'imminence d'une attaque de Boko Haram contre le lycée de Chibok le 14 avril, mais n'avait pas réagi faute de moyens.

L'insurrection islamiste a fait des milliers de morts depuis 2009, dont près de 2.000 depuis le début de cette année.Initialement concentrées dans le Nord à majorité musulmane, où Boko Haram revendique la création d'un Etat islamique, les violences ont récemment fait des dizaines de morts à Abuja avec plusieurs attentats à la voiture piégée.

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