Le calme était revenu mercredi dans l'Est de la République démocratique du Congo au lendemain de la défaite des rebelles du M23, mais il reste à transformer ce succès militaire en chemin vers la paix pour cette région éprouvée par vingt ans de conflit.
"Les Forces armées de la RDC (FARDC) ont le contrôle total de la situation dans la zone" reprise au Mouvement du 23 Mars, a déclaré le commandant de la force de la Mission des Nations unies pour la stabilisation de la RDC (Monusco), le général brésilien Carlos Alberto dos Santos Cruz.
"Aujourd'hui, c'est calme, vraiment, il n'y a rien à signaler", a indiqué à l'AFP le lieutenant-colonel Olivier Amuli, porte-parole de l'armée pour le Nord-Kivu.C'est dans cette province qu'a prospéré la rébellion du M23 pendant 18 mois jusqu'à ce que l'armée la chasse, avec l'aide de la Monusco, des deux collines où s'étaient retranchés ses derniers combattants face à l'offensive lancée le 25 octobre.
Les FARDC consolident leurs positions "conquises au prix du sang", a ajouté l'officier, sans donner plus de précisions sur les activités de l'armée.
Le Bureau de coordination des affaires humanitaires de l'ONU a indiqué que "plus de 35.000 personnes contraintes récemment à fuir leurs maisons devraient commencer à retourner chez elles".
"Nous demeurons préoccupés quant à la protection des civils face à l'existence d'importantes quantités d'engins non explosés", a cependant ajouté une porte-parole de l'OCHA.
A Jomba et Chengerero, localités du centre du pays tutsi d'où était partie la rébellion du M23, majoritairement composée de membres de cette ethnie rwandophone, plusieurs habitants témoignent du fait que les Tutsis congolais restent en fuite.Dans ces deux communautés agricoles à 80 km au nord de Goma, une équipe de l'AFP n'a rencontré qu'un seul Tutsi, Férécien, 62 ans.
Il dit être revenu avec sa femme et ses trois enfants à l'annonce de la paix.Il dit être rentré en raison d'un message du gouverneur de la province expliquant, selon lui, qu'il n'y a "pas de Tutsis, pas de Hutus, pas de Nandes, que des Congolais".
Le chef de la Monusco, Martin Kobler, a indiqué avoir "averti les autres groupes armés" qui pullulent dans la région, en particulier les Forces démocratiques de libération du Rwanda (FDLR) "de ne pas profiter [...] du vide actuel" laissé par le M23 sous peine de s'exposer à une riposte ferme des Casques bleus destinée à protéger la population.
L'important maintenant, a ajouté M. Kobler, c'est de "restaurer l'autorité de l'Etat dans la province [du Nord-Kivu], en particulier dans tous les territoires qui ont été libérés".
Il faut aussi "finaliser les étapes prochaines de l'accord qui a été discuté à Kampala", capitale de l'Ouganda, entre le gouvernement de Kinshasa et la branche politique du M23.
Une des revendications du M23 est que soient neutralisés les FDLR, qui harcèlent régulièrement la communauté tutsi.
Implantée dans l'Est de la RDC depuis 1994, cette milice rwandaise regroupe des extrémistes hutus dont certains ont participé au génocide rwandais qui a faits des centaines de milliers de morts, en majorité des Tutsis, en 1994.
Le gouvernement congolais, régulièrement accusé de les instrumentaliser et de les soutenir dans sa lutte contre certains groupes rebelles soutenus par le Rwanda et l'Ouganda, a annoncé mardi qu'après sa victoire sur le M23, l'armée allait lancer "incessamment" une offensive contre les FDLR.
"Il n'y a plus de place dans notre pays pour quelque groupe irrégulier que ce soit", a déclaré le ministre de la Communication, porte-parole du gouvernement, Lambert Mende, ajoutant: "Le M23 était en tête de liste, ils ont été remplacés par les FDLR.On va s'occuper de les désarmer."
M. Kobler a rappelé pour sa part que la Monusco avait reçu la mission de mettre hors d'état de nuire tous les groupes armés congolais.
Ida Sawyer, de l'organisation Human Rights Watch, estime qu'il restait de nombreux défis à relever.
Outre le désarmement des groupes armés, les autorités doivent se concentrer sur deux points, selon elle : "arrêter les dirigeants du M23 responsables de crimes de guerre" et autres atrocités et les juger à l'occasion de procès "justes et crédibles".
Elle a aussi réclamé "des ordres interdisant explicitement à tous les représentants des forces de l'ordre la moindre attaque de représailles ou violence contre des membres de la communauté tutsi ou des personnes soupçonnées d'avoir collaboré avec le M23".
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