Le mouvement jihadiste Al-Mourabitoune, actif au Sahel et créé par l'Algérien Mokhtar Belmokhtar, a prêté allégeance à l'organisation Etat islamique (EI) dans une déclaration d'un de ses responsables, diffusée par l'agence privée mauritanienne Al-Akhbar.
"Le mouvement Al-Mourabitoune annonce son allégeance au calife des musulmans Abou Baqr al-Baghdadi, bannissant ainsi les divisions et les dissensions au sein de l'Oumma (communauté musulmane, ndlr)", affirme l'enregistrement audio mis en ligne par Al-Akhbar, qui publie régulièrement les communiqués de jihadistes.
L'agence mauritanienne attribue cette déclaration à Adnan Abou Walid Sahraoui.Mais un journaliste de l'AFP à Bamako, régulièrement en contact avec M. Sahraoui, certifie qu'il ne s'agit pas de la voix de ce responsable jihadiste.
Selon Al-Akhbar, qui cite des sources au sein du groupe islamiste, Adnan Abou Walid Sahraoui est désormais le nouvel "émir" (chef) d'Al-Mourabitoune.
"C'est évident, qu'il est monté en grade et est devenu chef, parce que c'est lui qui a signé la déclaration" lue dans l'enregistrement, un tel texte "ne peut être signé que par les chefs", dit-on à l'agence mauritanienne, assurant n'avoir pu obtenir aucune information précise sur la situation actuelle de Mokhtar Belmokhtar, ancien chef d'Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi).
Donné plusieurs fois pour mort, ce chef jihadiste parmi les plus redoutés au Sahel a réaffirmé en avril 2014 son allégeance au chef d'Al-Qaïda, Ayman al-Zawahiri.
Jusqu'à 16H00 GMT jeudi, ni M. Sahraoui ni aucun responsable jihadiste n'avaient pu être joints par l'AFP.Sollicité par l'AFP, un responsable d'Al-Akhbar a précisé que le texte, signé de M. Sahraoui, avait été lu par un autre membre d'Al-Mourabitoune, contrairement à de précédentes informations indiquant que M. Sahraoui l'avait lui-même lu.
Dans le même enregistrement, Al-Mourabitoune invite "tous les mouvements jihadistes à prêter allégeance" au chef de l'EI "pour unifier la parole des musulmans et resserrer leurs rangs".
L'EI, qui contrôle de larges pans de territoires en Irak et en Syrie, est devenue une franchise de choix dans le monde jihadiste, attirant des combattants de l'étranger et l'adhésion de groupes islamistes comme Boko Haram, actif au Nigeria et dans des pays voisins.
Al-Mourabitoune est né en 2013 de la fusion des "Signataires par le sang" de Mokhtar Belmokhtar - cerveau de la meurtrière prise d'otages du site gazier algérien d'In Amenas - et du Mouvement pour l'unicité et le jihad en Afrique de l'Ouest (Mujao), un des groupes jihadistes ayant contrôlé le nord du Mali pendant près d'un an, entre 2012 et début 2013.
- 'Sous le label porteur de l'EI' -
Adnan Abou Walid Sahraoui s'est plusieurs fois exprimé au nom du Mujao mais aussi d'Al-Mourabitoune, notamment pour revendiquer des enlèvements, attaques ou attentats-suicides dans le nord du Mali, d'où le Mujao, Aqmi et d'autres groupes similaires ont en grande partie été chassés par une intervention militaire internationale déclenchée en janvier 2013 à l'initiative de la France, et toujours en cours.
Les jihadistes continuent cependant à y mener des opérations violentes.
Al-Mourabitoune a ainsi revendiqué le premier attentat contre des Occidentaux à Bamako, la capitale du Mali.Le 7 mars, cette attaque contre un bar très fréquenté par les locaux et les expatriés avait fait cinq morts: trois Maliens, un Français et un Belge.
Le groupe disait vouloir venger le prophète Mahomet "de l'Occident mécréant qui l'a insulté et moqué", avec les caricatures publiées par l'hebdomadaire satirique français Charlie Hebdo, dont une partie de la rédaction a été massacrée le 7 janvier par deux jihadistes à Paris.
Il évoquait aussi des représailles après la mort d'un de ses chefs, Ahmed el-Tilemsi, tué par l'armée française en décembre 2014 dans le nord du Mali.
Pour l'expert mauritanien du jihadisme dans le Sahel Isselmou Ould Salihi, cette déclaration d'allégeance pose des questions "au sujet du mouvement et de son chef" Belmokhtar, évoquant des rumeurs "selon lesquelles il serait mort ou grièvement blessé" et traduirait une "montée en puissance d'Adnan, qui signe le communiqué en lieu de son chef attitré".
L'annonce d'Al-Mourabitoune marque "un changement d'alliance" pour ce groupe, jusqu'alors considéré comme plus proche d'Al-Qaïda, qui s'est plus "illustré par des opérations limitées" alors que "l'EI s'illustre par des conquêtes territoriales et d'actions plus sanguinaires", a estimé M. Ould Salihi.
"Al-Mourabitoune, en perte de vitesse, cherche un nouveau souffle sous le label porteur de l'EI après des défaites cinglantes" dans ses zones habituelles d'opérations depuis l'intervention internationale au Mali, a-t-il conclu.
Envie d'afficher votre publicité ?
Contactez-nousEnvie d'afficher votre publicité ?
Contactez-nous
L'espace des commentaires est ouvert aux inscrits.
Connectez-vous ou créez un compte pour pouvoir commenter cet article.