Dans un espace flambant neuf de la Kigali City Tower, Lee Il-mo jongle avec son ordinateur portable, son Smartphone et sa tablette numérique.Avant, pour utiliser internet, il devait consommer une boisson dans un café, désormais l'accès est gratuit.
"Je télécharge des vidéos et des livres", glisse ce Sud-Coréen de 31 ans depuis le centre de la capitale rwandaise.
Depuis quelques années, le président Paul Kagame, au pouvoir depuis que son parti, l'ex-rébellion du Front patriotique rwandais, a mis fin au génocide des Tusti en 1994, rêve de transformer son pays, encore largement rural, en un centre névralgique régional en matière de nouvelles technologies.
Le mois dernier, Kigali a annoncé le déploiement du wifi gratuit dans certains lieux clés de la capitale, avec pour ambition de généraliser cet accès à tous les bâtiments publics, les hôtels, les bus ou encore les écoles secondaires du pays.
Le but, selon le ministre des Technologies de l'Information et de la Communication, Jean Philibert Nsengimana, est d'"accélérer la croissance du marché d'Internet au Rwanda" et d'attirer les investisseurs.
"La connectivité est l'un des plus grands atouts pour les affaires dans cet âge de l'économie numérique", affirme-t-il, soulignant que ce projet n'est que "la partie émergée de l'iceberg", que "la chose la plus importante, c'est la 4G".
En juin, Kigali a signé un partenariat avec l'entreprise sud-coréenne KT Corp, pour la construction d'un réseau 4G large bande.L'objectif: permettre à 95% des Rwandais d'avoir accès au haut débit d'ici trois ans -- seulement 10% de la population a pour l'instant accès à la 3G.
"L'internet à large bande, on le considère comme un bien de première nécessité, comme l'eau et l'électricité", plaide M. Nsengimana, précisant qu'une fois le stade de la 4G atteint, l'accès gratuit disparaîtra.
Sur cette ambitieuse route, se dressent cependant encore d'importants obstacles : la fourniture d'électricité laisse encore à désirer et si le Rwanda a fait des progrès en matière de lutte contre la pauvreté, il devra aussi réduire le fossé entre Kigali et les milieux ruraux pour permettre l'accès au matériel informatique à une population au pouvoir d'achat très faible.
Main d'oeuvre insuffisante
En attendant, pour réaliser son "Smart Kigali", le gouvernement compte sur le secteur privé.
Le wifi gratuit à Kigali "n'a rien coûté au gouvernement", explique M. Nsengimana.C'est "une contribution" volontaire du secteur des télécommunications.
Du côté du privé, l'enthousiasme est là, mais plus mesuré: "Smart Kigali est réellement un test, il va permettre de donner aux gens un aperçu des progrès à venir", dit Alex Ntale, directeur de la Chambre des Nouvelles technologies de l'information et de la communication du Rwanda.
"Mais ce ne sera pas éternel, quelqu'un va devoir payer un moment ou un autre.(�?�) Les entreprises cherchent leur modèle économique.(�?�) elles essaient de voir si le marché est effectivement là", explique-t-il.Si elles "ne trouvent pas de modèle économique, c'est leur droit d'éteindre les machines".
"Smart Kigali" a-t-il réellement les moyens de transformer le Rwanda en "centre d'affaires régional"?
A long terme, peut-être, estime Mark Bohlund, économiste spécialiste de l'Afrique subsaharienne chez IHS Global Insight, même si à court terme, dit-il, l'économie rwandaise "demeurera dépendante des revenus du tourisme".
L'idée serait d'abord de servir de tête de pont à l'Est, riche mais instable, de la République démocratique du Congo (RDC) voisine.Car le Rwanda restera confronté à la concurrence de la première économie régionale, le Kenya, leader en matière de paiement mobile et qui héberge déjà des géants des nouvelles technologies comme Intel, Google et Microsoft.
Elettra Pauletto, analyste chez Control Risks, juge elle que le Rwanda a encore des progrès à faire avant d'attirer de gros investisseurs.
Car, si le pays est l'un des moins corrompus d'Afrique et classé 3e en Afrique sub-saharienne par la Banque mondiale pour son amélioration de l'environnement des affaires, il reste "très faible en matière de suivi des entreprises nouvellement créées", juge-t-elle.
De plus, poursuit-elle, les qualifications "demeurent faibles, même si elles s'améliorent" et le Rwanda ne bénéficie pas encore d'une réserve de main d'�?uvre suffisante pour attirer les gros investisseurs.
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