Le secrétaire d'Etat américain John Kerry a mis en garde jeudi contre les risques de "génocide" et de "famine" au Soudan du Sud, menaçant les belligérants de sanctions s'ils ne mettent pas fin au conflit qui déchire cette jeune nation.
En visite en Ethiopie, M. Kerry a relayé les craintes de l'ONU qui avait parlé mercredi de la perspective d'un génocide et d'une famine dans ce pays en guerre civile depuis fin 2013, le conflit opposant les troupes du président Salva Kiir aux rebelles de son ex-vice-président Riek Machar.
"Concernant la question du génocide il y a des indicateurs extrêmement troublants de tueries ethniques, tribales (...) qui, si elles devaient continuer, présenteraient un très sérieux défi à la communauté internationale sur cette question du génocide", a déclaré M. Kerry devant la presse à Addis Abeba.
Et il s'est tout autant alarmé d'une possible "famine" si les combats se poursuivent."Nous devons essayer d'empêcher une famine à grande échelle qui pourrait résulter des violences qui ont actuellement lieu là-bas", a martelé le chef de la diplomatie américaine.
Il aussi brandi une nouvelle fois la menace de "sanctions" américaines contre les belligérants, tout en se gardant d'annoncer des mesures punitives concrètes qui viseraient MM.Kiir et Machar.
"Ceux qui sont responsables d'assassinats ciblés fondés sur l'ethnicité ou la nationalité doivent être traduits en justice et nous envisageons activement des sanctions contre ceux qui commettent des violations des droits de l'homme", a dit John Kerry.
Le cadre juridique pour ces sanctions est prêt depuis un décret présidentiel de Barack Obama le 3 avril.
Les combats, qui ont déjà fait des milliers de morts, se sont accompagnés de massacres et d'exactions contre les civils sur des bases ethniques.A la rivalité politique entre MM.Kiir et Machar se greffent de vieux antagonismes entre Dinka et Nuer, les deux principales communautés du pays dont ils sont issus.
- Kerry "franchement déçu" par les belligérants -
Des diplomates américains fulminent contre ce qu'ils qualifient de "bataille personnelle entre Riek Machar et Salva Kiir", qui "pensent qu'ils peuvent l'emporter militairement".
"J'ai franchement été déçu par les réponses apportées" par les deux ennemis, a fustigé M. Kerry, rappelant qu'il avait leur parlé de nombreuses fois depuis fin 2013.
Les Etats-Unis sont les parrains de la naissance du Soudan du Sud en juillet 2011 -- par la partition du Soudan -- et leurs diplomates reconnaissent en privé ne pas "avoir vu" à l'époque que la situation "pouvait tourner aussi mal et aussi vite".
Les avertissements de John Kerry font suite à ceux de la Haut Commissaire de l'ONU au droits de l'Homme, Navi Pillay.Elle avait jugé mercredi, en visite à Juba, que le Soudan du Sud était "au bord de la catastrophe".Elle s'était aussi dite "atterrée par l'apparente indifférence affichée par les deux dirigeants concernant le risque de famine".
De son côté, le conseiller spécial de l'ONU pour la prévention du génocide, Adama Dieng, qui accompagnait Mme Pillay, avait assuré que les Nations unies prendraient "toutes les mesures possibles" pour "protéger les populations (sud-soudanaises) d'un autre Rwanda", en allusion au génocide qui y fit quelque 800.000 morts en 1994 et que la communauté internationale fut incapable d'empêcher.
Addis Abeba accueille depuis des mois des pourparlers de paix entre les deux camps sud-soudanais, qui sont restés infructueux.Un cessez-le-feu signé le 23 janvier n'a jamais été respecté.
Après des entretiens avec ses homologues éthiopien, ougandais et kényan, John Kerry a également évoqué l'éventuel déploiement d'une "force légitime sur le terrain (...) aussi rapidement que possible".Il pourrait s'agir de "forces régionales sous (pavillon) de l'ONU", selon la porte-parole du département d'Etat Jennifer Psaki.
M. Kerry effectue sa première véritable tournée en Afrique pour se pencher au chevet des guerres du continent: au Soudan du Sud, mais aussi en Centrafrique, Somalie et République démocratique du Congo.
"Les Etats-Unis appuient les efforts conduits par les Africains pour faire face aux conflits les plus meurtriers du continent", a-t-il plaidé devant l'Union africaine, qui siège à Addis Abeba.
La diplomatie américaine privilégie depuis longtemps la mise sur pied de forces militaires pan-africaines, Washington se refusant à s'impliquer directement militairement sur le terrain.
M. Kerry est attendu samedi en RDC, puis en Angola.
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