La justice sud-soudanaise a libéré vendredi, à la demande du gouvernement, quatre ex-dignitaires du régime, proches de l'ancien vice-président Riek Machar qui a pris mi-décembre la tête d'une rébellion, jusqu'ici accusés de tentative de coup d'Etat.
"Considérant la requête (du ministre de la Justice) la Cour (...) ordonne l'arrêt de la procédure criminelle contre les accusés", a déclaré le juge présidant l'audience à Juba.
Les quatre hommes sont sortis du tribunal sous les acclamations de leurs partisans, qui les ont portés en triomphe.
Le ministre sud-soudanais de la Justice, Paulino Wanawilla, avait, pour "promouvoir le dialogue, la réconciliation et l'harmonie entre Sud-Soudanais", demandé jeudi la fin de la procédure contre les accusés, arrêtés mi-décembre aux premières heures de combats entre troupes rivales au sein de l'armée sud-soudanaise, élément déclencheur du conflit qui se poursuit depuis.
Le procès pour tentative de coup d'Etat de ces quatre dignitaires - l'ex-secrétaire général du SPLM (parti au pouvoir) Pagan Amum, l'ex-ministre de la Sécurité nationale Oyai Deng Ajak, l'ex-ambassadeur à Washington Ezekiel Lol Gatkuoh et l'ancien vice-ministre de la Défense Majak D'Agoot - s'était ouvert en mars.
Selon un observateur à Juba, il avait laissé apparaître peu d'éléments à charge.
"Il est désormais confirmé que nous avons été emprisonnés sans raison.Il faut désormais ramener la paix et la stabilité au Soudan du Sud.Maintenant que nous sommes libres, nous allons consacrer notre temps à travailler pour la paix et discuter tant avec le gouvernement que (...) l'opposition pour mettre fin à cette guerre insensée", a déclaré Pagan Amum à la presse.
Le tribunal a également levé les poursuites contre sept autres figures politiques, arrêtées également mi-décembre, qui avaient été libérées et remises au Kenya fin janvier en vertu d'un accord signé en marge du cessez-le-feu conclu le 23 janvier à Addis Abeba, mais jamais respecté.
- Massacres ethniques et atrocités -
Les poursuites sont en revanche maintenues contre M. Machar et deux de ses partisans, Taban Deng Gai, ex-gouverneur de l'Etat pétrolifère d'Unité (nord), et Alfred Lado Gore, ex-ministre de l'Environnement, ancien conseiller du président Salva Kiir et figure historique de la lutte d'indépendance contre Khartoum, tous en fuite.
Quand les combats ont éclaté à Juba mi-décembre, le chef de l'Etat avait accusé M. Machar de tentative de coup d'Etat et fait arrêter une dizaine de ses proches.L'ex vice-président avait nié, accusant M. Kiir d'avoir voulu se débarrasser de ses rivaux au sein du régime issu de la guérilla qui a combattu Khartoum entre 1983 et 2005 avant de déboucher sur l'indépendance du Soudan du Sud en juillet 2011.
Les affrontements opposant à Juba troupes fidèles au président Kiir - majoritairement issues de la communauté dinka - et celles loyales à M. Machar - essentiellement des Nuer - se sont rapidement propagés à plusieurs autres régions et se poursuivent depuis, accompagnés de massacres ethniques et d'atrocités imputables aux deux camps.
Le conflit a déjà fait des milliers de morts et chassé de chez eux plus d'un million de Sud-Soudanais, alors que la famine menace.
Mercredi, le Conseil de sécurité de l'ONU a brandi la menace de sanctions contre les responsables d'exactions et la Haut-Commissaire aux droits de l'homme Navi Pillay se rend la semaine prochaine au Soudan du Sud pour enquêter sur les tueries.
Les libérations de vendredi, qui interviennent alors que l'armée est en difficulté dans deux régions pétrolifères du nord, étaient une exigence fondamentale du camp Machar et l'un des principaux points d'achoppement des pourparlers de paix, jusqu'ici infructueux, qui doivent reprendre fin avril à Addis Abeba pour trouver une issue politique durable au conflit.
Les observateurs doutent que ces négociations, sous l'égide de l'Autorité intergouvernementale pour le développement (Igad, organisation sous-régionale est-africaine), débouchent sur des avancées concrètes.
Les belligérants veulent trouver une solution "de manière militaire et (...) par la négociation intra-soudanaise, mais pas à Addis.Ils veulent faire à leur manière" et refusent de se voir dicter quoi que ce soit de l'extérieur, a expliqué un diplomate en poste à Juba.
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