La justice du Zimbabwe a défié le gouvernement en levant mercredi l'interdiction de manifester dans la capitale Harare qu'il avait décrétée la semaine dernière en pleine fronde populaire contre le président Robert Mugabe.
La Haute Cour du Zimbabwe "a jugé que l'interdiction était illégale", a déclaré à la presse Tendai Biti, avocat et chef du Parti démocratique du peuple (opposition).Les manifestations "peuvent reprendre maintenant", a-t-il ajouté.
Le 1er septembre, la police, qui opère comme un "appendice" du régime selon l'organisation Human Rights Watch (HRW), avait interdit pour deux semaines, jusqu'au 16 septembre, toute manifestation dans la capitale Harare.
L'opposition avait dénoncé cette décision, apparentée selon elle à "un état d'urgence qui ne dit pas son nom".
"Nous sommes très fiers que le tribunal ait reconnu le pouvoir qui lui incombe selon les termes de la Constitution.Et, plus important encore, que les tribunaux se prononcent sans peur et sans parti pris", a indiqué Tendai Biti, qui a été ministre des Finances de Robert Mugabe jusqu'en 2013.
La Haute Cour a rendu mercredi "un jugement très courageux", a-t-il ajouté, en référence à la mise en garde adressée samedi aux juges par le chef de l'Etat.
M. Mugabe avait étrillé le pouvoir judiciaire en l'accusant de "négligence" pour avoir autorisé des manifestations de l'opposition en sachant "pertinemment" qu'elles pourraient être violentes.
Le chef de l'Etat, qui dirige d'une main de fer son pays depuis 1980, avait conclu d'un ton menaçant qu'il espérait que les juges avaient "retenu la leçon".
"C'est un jugement progressiste ! Nous sommes heureux", a réagi Stendrick Zvorwadza, l'un des leaders de la contestation au Zimbabwe.
L'association des avocats pour les droits de l'Homme au Zimbabwe, qui représente plusieurs manifestants arrêtés, a de son côté qualifié la décision de "victoire pour les militants".
Depuis plusieurs semaines, le Zimbabwe est le théâtre de manifestations qui dénoncent le régime de Robert Mugabe, 92 ans, et la grave crise économique que traverse le pays.Elles sont régulièrement dispersées par la police à coups de matraque ou de grenades lacrymogènes.
Ce n'est pas la première fois que la justice zimbabwéenne défie le régime.En avril, dans un mouvement inattendu, elle avait ordonné la libération du pasteur Evan Marawire, figure de la contestation anti-Mugabe aujourd'hui en exil aux Etats-Unis.
Vendredi, un autre tribunal avait néanmoins refusé la libération sous caution de 58 militants arrêtés le 26 août lors de manifestations qui avaient dégénéré en affrontements.
Parmi ces militants toujours incarcérés figure notamment Promise Mkwananzi, le leader du mouvement #Tajamuka ("Nous sommes agités"), qui regroupe de jeunes Zimbabwéens appelant à la démission de Robert Mugabe.
Les manifestants, surtout issus de la société civile, réclament pêle-mêle le départ du dirigeant, un changement de politique économique mais aussi une réforme électorale en vue des élections de 2018, où M. Mugabe a déjà annoncé son intention de se représenter.
Il avait facilement remporté le dernier scrutin en 2013 entaché néanmoins de soupçons de fraude massive.
Envie d'afficher votre publicité ?
Contactez-nousEnvie d'afficher votre publicité ?
Contactez-nous
L'espace des commentaires est ouvert aux inscrits.
Connectez-vous ou créez un compte pour pouvoir commenter cet article.