Le pasteur Evan Mawarire, l'un des leaders du mouvement citoyen de contestation contre le président zimbabwéen Robert Mugabe, a été arrêté et inculpé mardi pour incitation à la violence publique, à la veille de grèves dont le régime rejette la responsabilité sur l'Occident.
La semaine dernière, une grève générale - rare dans ce pays contrôlé d'une main de fer par Robert Mugabe depuis 1980 - avait provoqué la fermeture de commerces, d'écoles, de tribunaux et perturbé les transports en commun.
A l'origine de cette grève, un vaste mouvement citoyen très actif sur les réseaux sociaux, alors que l'opposition zimbabwéenne apparaît divisée et amorphe.
Ce mouvement a appelé à une nouvelle grève jeudi et vendredi sur fond de frustration croissante de la population contre le président Mugabe, 92 ans et plus vieux chef de l'Etat en exercice dans le monde.
Le Zimbabwe est embourbé depuis les années 2000 dans une terrible crise économique.Environ 90% de la population active n'a pas d'emploi formel.Les banques et l'Etat manquent de liquidités, ce qui a provoqué un retard dans le paiement des fonctionnaires en juin.
Dans ce contexte délétère, l'une des figures du mouvement de contestation, le pasteur Evan Mawarire "a été arrêté et inculpé d'incitation à la violence publique" mardi, a déclaré à l'AFP son avocat Harrison Nkomo.
Quelques heures plus tôt, il s'était rendu de son proche chef à la police qui l'avait convoqué.Selon l'un de ses assistants, il brandissait une Bible et un drapeau zimbabwéen, en référence au mouvement de contestation qu'il a lancé sur internet il y a quelques mois #ThisFlag (CeDrapeau).
Ce hashtag est depuis devenu un symbole du ralliement citoyen contre le régime Mugabe.
Le pasteur baptiste de 39 ans s'est rapidement fait un nom en postant, en avril sur internet, une vidéo où il s'en prenait à la corruption et à l'incurie du gouvernement Mugabe.Dans ce clip, il était enveloppé dans un drapeau zimbabwéen.
La police a refusé mardi de confirmer l'arrestation du pasteur, la porte-parole expliquant être occupée dans une réunion.Mais l'Association zimbabwéenne des droits de l'Homme a qualifié cette interpellation d"inquiétante".
"Mawarire n'a rien fait de mal.(...) Il appelle simplement le gouvernement à abandonner des politiques qui ne servent pas les intérêts du peuple de ce pays.Il est dans son droit de protester", a déclaré à l'AFP le président de l'association, Okay Machisa.
Selon le mandat d'arrêt du pasteur, consulté par l'AFP, Evan Mawarire "serait en possession d'un casque de police volé, d'une matraque et d'autres objets subversifs qu'il a utilisés pour inciter à la violence notamment le 6 juillet et qu'il comptait utiliser le 13 juillet".
- L'Occident montré du doigt par Mugabe -
Avant son arrestation mardi, le pasteur avait appelé, dans un nouveau message vidéo, à poursuivre le mouvement.
"Lorsque nous protestons, pas de violence, donc nous continuons mercredi 13 et jeudi 14 juillet.Nous optons pour des fermetures parce que c'est tout ce que nous pouvons faire pour que le gouvernement nous écoute", avait-il expliqué.
La semaine dernière, le président Mugabe avait une fois de plus rejeté sur les puissances occidentales la responsabilité de la situation."Le paiement des salaires peut être retardé à cause des sanctions" des Etats-Unis et de l'Union européenne, avait-il argué lors d'un meeting politique.
Le mouvement citoyen "ne peut être qualifié de +Printemps zimbabwéen+ mais (...) il commence à monter en puissance", a commenté Charles Laurie, analyste chez Verisk Maplecroft spécialisé dans l'évaluation des risques.
"En l'absence de partis d'opposition cohérents, le nouvel adversaire politique" du régime "a émergé d'un mouvement très actif sur les médias sociaux", a-t-il relevé.
"Les électeurs zimbabwéens peuvent se retrouver unis afin d'entrer dans l'ère post-Mugabe, mais une transition politique réussie nécessitera une direction claire et unie", a-t-il cependant souligné.
De son côté, le président Mugabe, qui continue en dépit de son âge à prononcer de longs discours et à se déplacer sans aide, a prévu de se présenter à la présidentielle en 2018.Il aura alors 94 ans.
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