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Souvenirs des Jeux Olympiques : l'escrimeuse Ndeye Bineta Diong et la judokate Asmaa Niang racontent leurs JO

Vendredi 26 juillet, les Jeux olympiques de Paris vont officiellement commencer. Plus de 10 500 athlètes représenteront leur pays. Le rêve d’une vie qui, pour certaines, demande énormément de sacrifices. L’escrimeuse Ndeye Binta Diong et la judokate et auteure, Asmaa Niang nous racontent.

Ndeye Bineta Diong et Asmaa Niang ont toutes deux participé aux Jeux Olympiques.
Ndeye Bineta Diong et Asmaa Niang ont toutes deux participé aux Jeux Olympiques.
Crédit : Wikicommons/Wikipédia

26 juillet 2024 à 14h46 par Keisha MOUGANI

“Même si je n’ai pas le palmarès de Laura Flessel, j’ai un parcours qui inspire et si les jeunes peuvent s’inspirer de mon histoire et faire mieux, ce sera ma médaille”, explique Ndeye Bineta Diong, 36 ans, escrimeuse sénégalaise, plusieurs fois championne d’escrime du Sénégal et d’Afrique. Elle est également maîtresse d'armes. 

Elle représentera le Sénégal pour la deuxième fois aux Jeux olympiques de Paris. Sa première participation remonte à 2021, à Tokyo, au Japon.

La première fois qu’elle touche une épée, c’est dans le quartier elle réside. “Je n’ai pas choisi l’escrime. C’est un ami de mon père qui nous a initiés et c’est en faisant les compétitions que j’y ai pris goût.”, raconte-t-elle.

Le rêve d'une vie

À l’âge de 15 ans, elle se met à rêver des Jeux, notamment en regardant l’escrimeuse française Laura Flessel. “Je voyais toutes ces femmes pleurer en recevant leurs médailles, j’ai commencé à en faire un rêve.”, se remémore-t-elle.

Mais très vite, elle se heurte à des discours décourageants par rapport à son ambition de briller dans un sport de niche, son sexe et, plus tard, son âge. “ On me disait : 'tu es dans le sport, tu éprouves des difficultés et toutes tes camarades sont mariées'. Mais moi je ne voyais que mon objectif , raconte-t-elle. 

En 2021, elle participe pour la première fois aux Jeux olympiques de Tokyo. Un rêve éveillé pour l’épéiste mais assombri par des difficultés financières. “L’escrime n’est pas un sport très connu au Sénégal et il coûte très cher”, souligne-t-elle. Malgré la présence d’une fédération d’escrime au Sénégal, elle a dû s’autofinancer, grâce à des petits boulots et son activité de maîtresse d’armes. Elle a aussi lancé une cagnotte pour préparer et participer aux Jeux de Tokyo.

Elle a également pu compter sur quelques membres de sa famille, amis et son coach Daniel Levasseur- ancien entraîneur de Laura Flessel - qui a pris en charge une partie de ses déplacements et l’a entraîné gracieusement. “Une préparation coûte en moyenne 30 à 40 000 euros, voire plus. Et je n’ai pas fait toutes les compétitions internationales”.

Dans le budget, entre également en compte l’achat et l’entretien du matériel, les frais de transport, la participation aux stages et les frais d’hôtel. Cette aventure a rapidement eu un impact sur sa santé mentale. “J’avais décidé d’arrêter parce que c’était très dur et je ne voulais plus revivre tout ce que j’ai vécu pour en arriver là.” Pourtant, elle sera présente aux Jeux Olympiques de Paris. “L’objectif est d’aller le plus loin possible. Même si je ne gagne pas Paris, j’aurai la médaille du courage.” 

Des Jeux sous haute pression

“La réalité, c'est que des fois, on part sans coach, sans staff… On porte sur nos épaules des choses…. Je suis toujours en admiration par la capacité des athlètes africains à s’adapter”, raconte Asmaa Niang, ex-judokate maroco-sénégalaise.  Elle a l'un des meilleurs palmarès du judo marocain (catégorie moins 70 kg), elle est vice-championne d'Afrique et détient cinq titres de championne d’Afrique.. Asmaa Niang a participé deux fois aux Jeux olympiques : Rio, en 2016 et Tokyo en 2021. Elle est devenue auteure et préparatrice mentale.

Dans son parcours, elle a été confrontée à plusieurs épreuves. Elle a commencé le judo à 20 ans, a participé à ses premiers Jeux à 34 ans et  a connu les mêmes problématiques que certains athlètes africains. Lors de sa participation aux Jeux de Tokyo, elle a dû venir seule, car son staff technique (entraîneur, kiné, etc.) n'a pas pu l'accompagner, faute de visa. Enfin, elle pratique une discipline peu populaire et médiatisée au Maroc, où le football règne en maître.

Comme Ndeye Bineta Diong, elle a été très marquée par la préparation des Jeux et surtout les conséquences sur le mental. “La difficulté était de trouver l’équilibre entre la santé physique et mentale et ces piliers n'ont pas été respectés. Je me bats pour ça aujourd’hui.”, estime-t-elle.

Elle souligne notamment le manque de considération et d’estime envers les athlètes du continent africain. “Il n’y a pas vraiment d’équité entre les pays et continents. Beaucoup d’athlètes africains n’ont pas les mêmes moyens que les autres  et on leur dit de faire les compétitions au même titre que les autres continents”, regrette-t-elle. 

Développer les investissements dans le sport et s’engager davantage dans la diversité

Bien que le continent regorge de championnes et champions olympiques, la judokate considère “qu'ils sont les arbres qui cachent la forêt”.

Elle considère qu’il y a un travail à faire dans différents domaines pour que les athlètes africains puissent performer davantage dans les compétitions internationales, d’un côté, et que les femmes soient davantage mises en valeur dans le monde du sport, de l'autre. “J’ai rarement vu de femmes présidentes ou vice-présidentes et la solution pour la mise en valeur des femmes sportives commence par là : trouver plus de femmes dans les structures politiques et sportives, s’ils veulent que le sport féminin brille et qu’il y ait une bonne santé mentale.”, développe-t-elle.